Moins connus que les autres acteurs de l’assurance (compagnies, intermédiaires, experts,..), les réassureurs jouent pourtant un rôle essentiel :
Le réassureur rachète aux compagnies (les « cédantes ») une fraction de leurs risques.
Ce contrat d’assurance entre l’assureur et le réassureur s’appelle un traité.
Il permet aux cédantes :
-de surmonter les pics de sinistralité (ex tempête de 1999) que les cédantes ne pourraient seules absorber (excès en fréquence/excès en intensité)
-d’homogénéiser les communautés de risque en portefeuille
-de lisser leur bilan d’une année sur l’autre
-de diminuer dès lors ses besoins en fonds propres
-de réduire les taxes sur les opérations d’assurance (chut !)
-de se conformer aux demandes des actionnaires, des agences de notation et des autorités
Bien entendu, ce système suppose que les réassureurs ne soient eux-mêmes pas débordés par un sinistre majeur (ouragan, tempête, accident nucléaire,..).
Les premiers réassureurs apparaissent au XIXème siècle (la Kölniche Rück, en 1846) pour assister les assureurs qui ne pouvaient plus faire face aux besoins d’assurance des grands ensembles issus de la révolution industrielle.
Le réassureur intervient :
-soit de manière proportionnelle : il rachète par exemple 50% des contrats
-soit en « excess » : il paye par exemple les sinistres supérieurs à 1 mio EUR.
Plus précisément, le réassureur pourra intervenir :
- En « Excess of Loss » : Il couvre (jusqu’à un plafond) les sinistres au-delà d’un montant prédéfini (par ex : au-delà de 10 mios de sinistres, il couvre les 2 mios supplémentaires)
- En « Stop loss » : il couvre une partie des pertes de l’assureur (par ex : au-delà de 120% de rapport S/P Sinistre/Prime, jusqu’à 140%).
On parle aussi de réassurance :
-soit « obligatoire » : l’assureur s’oblige à céder tous les risques d’une classe donnée (ex : tous ses immeubles)
-soit « facultative » : le réassureur sélectionne ou pas un risque (ex : une usine) sur lequel on lui demande une réassurance
Pour être complet, signalera qu’il convient de distinguer :
-la réassurance-vie 30%
-la réassurance non-vie 70%
de même que les assureurs se répartissent entre vie et non-vie.
Ultérieurement, les réassureurs pourront encore lisser le risque en s’échangeant entre eux des blocs de contrats.
Notons que le traité ne lie que l’assureur et le réassureur. L’assureur reste engagé à rembourser son client final, son assuré, dont il est ducroire (même si le réassureur refusait son appel en garantie).
Le marché de la réassurance est très concentré : 10 acteurs font 70 % de l’activité, même si les réassureurs sont en réalité bien plus petits que les assureurs : Axa Group fait 118 milliards de dollars, tandis que Swiss Re en fait 34.
Parmi les principaux réassureurs, on peut citer : Swiss Re, Munich Re, Hannover Re, puis… SCOR, fleuron français de la réassurance et 4eme de ce classement.
Ainsi, SCOR, en 2019 :
A un chiffre d’affaire de 18 milliards de dollars
Un rapport « sinistre à primes « (S/P) de 68 (paie 68 de sinistres quand il encaisse 100 de primes)
Des frais de gestion de 31%
Et donc un « ratio combiné » de 68+31=99, qui représente la totalité des dépenses du réassureur (sinistres, salaires,..) vs ses recettes (hors produits de placement financier). Un assureur ou réassureur tente donc d’avoir un ratio combiné inférieur à 100.
Forts de leurs achats en masse de contrats, les réassureurs sont de bons connaisseurs des grands risques (tempêtes, inondations,..).
A noter qu’il existe des courtiers en réassurance.
En quoi cela me concerne-t-il ?
Au moment où il achète un bloc de contrats (par exemple : multirisques industrielles), le réassureur pourra exiger que tous les contrats prévoient telle clause de prévention (par exemple : sur le sprinklage ou sur la vérification thermographique des installations).
Dès lors, l’assuré qui souhaite négocier une adaptation contractuelle risque de se voir répondre par la compagnie que « cela est incompatible avec le traité de réassurance ».
Deux remarques finales :
-la taille de leur bilan augmentant (les assureurs deviennent des monstres), certaines compagnies peuvent ne plus éprouver le besoin de se réassurer (dans certains cas), pratiquant une rétention du risque (un peu comme les grandes multinationales). On constate d’ailleurs l’émergence de groupes hybrides Assurance-Réassurance (AIG-Validus par ex). Certains grands réassureurs (Munich Re, Hannover Re) sont présents des deux côtés.
-l’alternative, ou le complément, à la réassurance est la coassurance, qui consiste à aligner un pool d’assureurs face à un risque, pool mené par un leader (l’ « apériteur »). Là encore, le retour à la coassurance diminue fortement, la « capacité » des compagnies étant plus importante.
Nous voilà réassurés…